Dernière mise à jour : 9 décembre 2013
La route de Thionville
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La route de Thionville pendant la seconde guerre mondiale
- l'usine Hobus-Werke et le camp de prisonniers -
Petit rappel :
Le 3 septembre 1939, la France et le Royaume-Uni déclarent la guerre à l’Allemagne. Après 8 mois de drôle de guerre, le 10 mai 1940, l’Allemagne déclenche à l’ouest une offensive foudroyante.
Le 17 juin, les Allemands occupent le village de Woippy.
Le 25 juin, l’armistice met fin aux hostilités.
Le 24 juillet, l’Alsace et la Lorraine sont incorporées à l’Allemagne par une annexion de fait.
La Moselle est intégrée au Gau Westmark avec à sa tête le Gauleiter Joseph Burkel chargé de re-germaniser la Moselle.
A partir d’octobre, les grandes communes environnantes sont intégrées à la ville de Metz qui devient Gross-Stadt Metz, d’autres communes dont Wappingen ne sont intégrées qu’en avril 1941.
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1 - L'usine Hobus Werke
Hobus : Hochwertige Bauer & Schaurte Schrauben (Vis de haute précision Bauer & Schaurte)
Le 21 avril 1941, une fabrique de visserie installée à Schwarzenbeck, près de Hambourg, transfère son siège à Metz et prévoit de s’installer sur le territoire de Woippy.
Peu après le carrefour Peugeot, à cette époque, sur le côté gauche de la route et jusqu'aux voies de chemin de fer, à part un dépôt de carburant installé près du quai militaire non loin du CRE, ce ne sont que des champs et des jardins. C'est sur ce grand espace que l'usine est construite.
Inscription au Registre du Commerce de l’Usine Hobus-Werke publiée dans la Metzer-Zeitung du 18 juillet 1941 |
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Raison sociale : HOBUS-Werke G.m.b.H., fabrique de visserie à Schwarzenbeck.
Siège : En application de la décision du conseil d’administration du 21.4. 1941, le siège de Schwarzenbeck a été transféré à Metz.
Objet de l’entreprise : Fabrication et vente de boulons et écrous et autres pièces en particulier par l’exploitation des brevets et expériences de l’entreprise Bauer & Schaurte.
Fond social : 6 000 000 Reichmarks.
Chef d’entreprise : La société a au minimum deux directeurs. Elle est représentée soit par deux directeurs soit par un directeur associé à un fondé de pouvoir.
Sont nommés comme directeurs :
1. Monsieur le Directeur Docteur Ingénieur Kurt Mütze, à Neuss sur le Rhin.
2. Monsieur le Directeur Alexandre Stamm, Aumühle près Hambourg, 3 Allée Emile Specht.
Un exemplaire du présent document a été déposé au Tribunal de Grande Instance de Metz (Chambre de Commerce) le 23 juin 1941.
Pour publication :
Metz-Woippy, le 18 juin 1941, Route de Thionville 165-167.
Hobus-Werke G.m.b.H.
Stamm, Mütze.
[ G.m.b.H. = Gesellschaft mit beschränker Hafnung = S.A.R.L.] |
Son adresse est :
Diedenhofener Landstrasse 165-167. Metz-Wappingen.
Dès le mois de mai 1941, des annonces sont insérées dans les quotidiens de l’époque, la
Metzer-Zeitung et la
NSZ-Westmark afin de recruter du personnel pour réaliser la viabilisation du terrain (routes, égouts, etc.) et pour construire les bâtiments.
Pour la direction locale des travaux de construction de notre grande installation industrielle de Metz, nous recherchons le plus tôt possible sinon dans l’immédiat :
2 techniciens routes et travaux en profondeur
2 technicien hautement qualifiés en construction métallique , béton et ossature comme conducteurs de travaux. |
Nous recherchons pour embauche immédiate plusieurs Contremaîtres et Régleurs de valeur sur tours à reproduire.
Juillet : Nous recherchons pour notre usine à Metz plusieurs Chefs d’atelier.
Demandes accompagnées de copies de diplômes, C.V., photo, prétention de salaire et certificats de travail à adresserà |
Août : Nous recherchons pour notre usine à Metz
2 Ingénieurs comme assistants au chef de fabrication.
Connaissances requises sur l’occupation des machines, la distribution du travail et la technique de production.
Demandes accompagnées de… |
1er août 1941. L’usine recherche un homme énergique d’âge moyen pour l’emploi de Portier et pour le service de surveillance de son usine
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Septembre, deux annonces sont encore insérées dans la presse :
La Hobus-Werke recherche :
- des Projeteurs pour fabrication en grande quantité de petites pièces et pour la construction de machines et outillage pour production unique en série.
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- et plusieurs Trempeurs pour leur atelier de trempe d’outillage.
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Une vue des cuisines de l'usine Hobus. Ces installations seront déménagées sur la ligne Maginot après la guerre.
Prisonnières et prisonniers russes travaillant à l'usine Hobus revenant de la cueillette des pommes route de Saulny.
Cette usine qui fabrique des pièces pour l'aviation est bombardée par les alliés une première fois le 27 mai 1944 vers 14 heures. Seules les deux halles les plus proches de Maison-Neuve sont sérieusement endommagées. Des bombes incendiaires atteignent plusieurs maisons du village.
Le second raid du 18 août stoppe définitivement la production.
Un train de munitions et un train militaire brûlent entre les gares de Woippy et Metz-Nord. La libération de Woippy est proche... elle a lieu le 16 novembre.
Reconnaissance aérienne après le premier bombardement du 27 mai 1944 |
Deuxième bombardement du 18 août 1944 |
Reconnaissance aérienne après le deuxième bombardement |
21 septembre 1944 |
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Les halles après le bombardement du 18 août. |
et la voie ferrée...
Voir un compte-rendu de la situation après ces bombardements : - clic -
1946, stockage de véhicules militaires sur le site Hobus, visible sur la vue aérienne ci-dessous (flèche)
Vue aérienne du site Hobus en 1946 Origine du document : Association pour le Développement de la Recherche Archéologique en Lorraine (ADRAL) |
2 - Le camp de Woippy
A l'extrémité gauche de la future rue Pierre-Boileau, en septembre 1943 débute la construction d'un camp de prisonniers.
Ce camp de prisonniers aura vu passer au total 4 336 détenus. Lors de l'avance des alliés en 1944, le camp est abandonné dans la nuit du 31 août au 1er septembre. A l'initiative d'un habitant de Woippy, Pierre Kopp (dont une rue de Woippy porte son nom), les prisonniers s'échappent.
A ma connaissance, aucune photographie de ce camp existe. Sauf une vue aérienne réalisé en 1946 dont extrait ci-dessous.
Ce sinistre camp se situait à peu près à l'emplacement actuel du Centre de formation professionnelle pour adultes.
Aussi, en novembre 2004, une plaque commémorative a été apposée sur le mur extérieur de ce centre.
Le
Républicain Lorrain du 16 novembre 2004 relate la manifestation :
D'un même geste, Jean-Marie Rausch et François Grosdidier ont dévoilé la plaque commémorative du « camp de Woippy, véritable lieu de terreur et de mort. » |
De mémoire de Pierre Brasme, seuls deux anciens prisonniers du camp de Woippy sont encore en vie. L'un a publié ses «
souvenirs de guerre ». Un livre qu'a parcouru l'historien local : «
A sa lecture, on frémit. C'était vraiment un lieu de répression nazie. »
Des 4 336 prisonniers enfermés en ce lieu, entre novembre 1943 et le 1er septembre 1944, ne reste qu'une liste de noms, précieusement conservée aux Archives départementales. Et une stèle, fleurie chaque année, au cimetière de Chambière, où sont inhumés les ossements mis au jour en avril 1963.
Woippy n'a pas oublié. «
Il manquait une matérialisation de ce lieu de souffrance. » Sur proposition du président de la Société d'histoire de Woippy, Pierre Brasme, docteur en histoire contemporaine, le maire de la ville a comblé le vide.
François Grosdidier a dévoilé, hier, une plaque rappelant le martyre de ces hommes, prisonniers de guerre russes, résistants mosellans, déserteurs, réfractaires à l'incorporation, passeurs, otages, évadés des stalags, détenus dans le camp dit de Woippy, ouvert par les SS, avenue des Deux-Fontaines, à proximité de l'usine Hobus Werke, en réalité sur le territoire de la ville de Metz.
D'où la volonté du maire de Woippy d'associer Jean-Marie Rausch à son geste et à la cérémonie d'inauguration qui s'est tenue rue Pierre-Boileau où sont implantés les bâtiments du centre de formation professionnelle des adultes.
Témoignages
«
Woippycien » dans les années 1953 à 1975, le maire de Metz a, à l'époque, recueilli quelques témoignages de ces anciens prisonniers. Il en a fait état dans son propos et souligné «
Cette ville est mêlée dans mon souvenir aux faits de guerre. Je suis à la fois le témoin et celui qui se souvient. »
D'autres souvenirs ont émergé, à l'évocation de «
Me Henri Charvet, Camille Thiriet, arrêté début 44 parce que ses deux fils avaient quitté clandestinement Woippy pour échapper à l'incorporation dans la Wehrmacht. » François Grosdidier a également cité les récits laissés par «
Lucie Mayot, André Tiné, Jean Heipp, Catherine Welfringer, Ernest Kempnich, resté pour la postérité, le célèbre Père Tranquille. »
Résistants woippyciens, ils ont marqué l'histoire de la ville et sa libération, étroitement liée à celle de Metz. «
Six semaines avant, indique François Grosdidier,
Pierre Kopp, Woippycien travaillant à l'usine Hobus Werke, en contact avec les prisonniers manutentionnaires dans cette même usine, pénètre dans le camp, la nuit du 31 août au 1er septembre et incite les 540 détenus à s'en évader. »
Thierry de Nonancourt, directeur de l'AFPA, et son équipe ont volontiers ouvert leurs portes aux officiels et hôtes de cette journée symbolique. Un symbole pour le maire de Woippy : «
Puissions-nous nous en souvenir pour bâtir et entretenir en ce même lieu une société de concorde, de respect, de tolérance et, puisqu'il s'y est érigé à la place un centre de formation, d'espoir dans les générations futures ».
B. P
Le camp de Woippy et la presse d'après guerre
LL - 12 juin 1945
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RL - 1er janvier 1946
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LL - 18 mars 1947 |
LL - 5 mai 1948
RL - 16 décembre 1950 |
RL - 18 novembre 1948
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(Pour lire ces articles : page "menu" et cliquer sur l'année)
En avril 1963, lors des travaux de nivellement de l'autoroute passant à Metz-Nord, un charnier datant de la seconde guerre mondiale fut découvert. Selon certains témoins ayant séjourné au camp de Woippy, il s'agissait en grande partie de prisonniers russes exécutés fin août 1944. Un second charnier moins important fut découvert un mois plus tard.
Tous ces ossements représentant plus de 160 corps furent transférés au cimetière militaire de Chambière. Un monument a été inauguré le 20 décembre 1965.
(Pour lire les articles du RL relatant les faits :
Page "Menu" - "Metz (Articles de journaux)", cliquer sur « Découverte d'un charnier à Metz-Nord en avril 1963 » |
(Pour plus de précisions sur l'usine Hobus-Werke et le camp de prisonniers,
voir l'ouvrage de Pierre Brasme, WOIPPY de 1871 à nos jours, Editions Serpenoise, 1994, Pages 231-274)
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