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La route de Lorry
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 Petite visite du cimetière 

Cette « Petite visite du cimetière » a été éditée dans les Chroniques du Graoully N° 7 - Septembre 1997, revue annuelle de la Société d'Histoire de Woippy.
Aujourd'hui, cette visite est complétée par des mises à jour et des documents photographiques.

* * *
     Nous commencerons la visite en entrant dans le cimetière par la porte située sur la route de Lorry. Cette entrée donne accès à la partie appelée couramment « l’ancien cimetière ». Pourquoi ? La raison en est simple, c’est ici que tout commença (en toute modestie) : depuis des siècles, les villages de Lorry et de Woippy partageaient la même vie cultuelle dans une église construite entre ces deux villages, à l’emplacement actuel de cet « ancien cimetière ». Par des écrits fort anciens, nous avons connaissance de l’existence d’une église à Lorry au début du XVe siècle, mais les deux paroisses ne seront séparées qu’en 1673. L’église revient alors en « totalité » aux paroissiens de Woippy et elle le restera jusqu’à la construction et la consécration de la nouvelle église au milieu du XIXe siècle. Comme toute ancienne église, les défunts étaient inhumés au pied de la construction et, au fil des années, le cimetière prenait forme. Tout comme à Lorry, Saulny et Norroy.
Menaçant ruine, cette ancienne église de Woippy fut démolie par la suite, mais son clocher subsista jusqu’au début 1900. Le cimetière fut conservé. Il fut plusieurs fois agrandi pour donner sa forme actuelle. Le dernier aménagement, « le cimetière paysager » a été réalisé il y a déjà vingt ans ; l’avant-dernière extension, « le nouveau cimetière », datait de septembre 1973.
Pénétrons maintenant dans les lieux...


     À une dizaine de mètres sur notre gauche, un petit monument cubique en pierre surmonté d’une croix. C’est le mémorial de la famille PAQUET D’HAUTEROCHE. Celui-ci nous permet d’honorer la mémoire du premier historien de Woippy : René PAQUET.
René Paquet est décédé à Paris le 30 avril 1927 dans sa 82ème année. Fils de Claude Joseph Henri Paquet, capitaine de frégate en retraite, officier de la Légion d’honneur, et de Julie Anne Marguerite Boussard d'Hauteroche, il est né à Charleville, dans le Ardennes, le 29 septembre 1845, mais dès son plus jeune âge, il devient messin. En 1849, ses parents achètent le domaine du Rucher (ancien trescens du Chapitre de la cathédrale) mais habitent la plus grande partie de l'année à Metz rue de l'Esplanade (à l'emplacement actuel des Galeries Lafayette) où naquit sa sœur Marie-Anne en 1850.
Licencié en droit, avocat à la Cour de Paris, René Paquet se laisse, jeune encore, captiver par les enchantements du Val de Metz et s'y consacrera, on peut le dire, de toute son âme. Les ouvrages qu'il écrit sur la faune locale, sur la chasse, surtout son histoire de Woippy en 1878, sont là pour le prouver. Quelques mois avant sa disparition, il venait de publier sa célèbre Bibliographie analytique de l'Histoire de Metz pendant la Révolution (deux volumes totalisant plus de 1500 pages), que tout bibliophile averti se doit de posséder.
Henri-Remi-René Paquet, aussi connu sous l'anagramme Nérée Quepat, est enterré au cimetière de Montmartre. Un mois après sa mort, une messe de Requiem était célébrée en l'église de Woippy pour le repos de son âme. Le maire et le conseil municipal, le Souvenir Français avec son drapeau, la compagnie des pompiers et toute la population assistaient à l'office. Plusieurs personnalités de Metz figuraient parmi l'assistance. Pour l'anecdote, le journal Le Lorrain qui avait oublié dans son compte-rendu de citer des personnes présentes à l'office, répara son oubli dès le lendemain.
Notons que la mère de René Paquet, décédée à Paris en 1896 à l’âge de 73 ans écrivait sous le pseudonyme de Remy d’Alta-Rocca.

À droite de ce mémorial, le monument sis sur la tombe possède en sa partie basse une petite plaque de marbre : Alfred GAGNEUR, 1892-1922. Alfred Gagneur travaillait à l’usine d’Hagondange ; durant son travail, il fit une chute d’une hauteur de 12 mètres et se fractura le crâne et les deux bras ; transporté à l’hôpital Belle-Isle à Metz, il décéda trois jours plus tard le 10 février 1922 : âgé de 30 ans, Alfred Gagneur laissait une veuve.
Plusieurs Woippyciens furent victimes d’accidents du travail aux usines d’Hagondange, comme Lucien Munier (18 ans) en juillet 1926. Il travaillait à l’atelier central mécanique, lorsqu’un bassin contenant de la laque liquide servant à isoler des câbles explosa : trois jeunes ouvriers travaillant à proximité, dont Lucien, furent atteints par des jets liquides en ébullition, et leurs vêtements s’enflammèrent. Transportés tous trois à l'hôpital de l'usine, seul Lucien, très gravement brûlé, décéda.
Ou comme Edouard Bertin (40 ans), qui en 1952 travaillait à la Safe à Hagondange. Occupé au four électrique, il chuta accidentellement dans une coulée de scories en ébullition. Malgré ses graves blessures, il réussit à sortir par ses propres moyens de la cuve. Transporté à l’hôpital Bon-Secours, il ne survécut pas à ses brûlures. Il était marié et père de 4 enfants.

La tombe suivante est celle de l’abbé Jean-Baptiste GAUTIEZ.
Arrivé à Woippy au mois de mars 1858, il administre la paroisse jusqu'au mois d'août 1890, date à laquelle arrive son remplaçant, l’abbé Louis-Auguste Laurent. Malheureusement, l’abbé Gautiez ne profita pas longtemps de son repos bien mérité car deux ans plus tard, en juillet 1892, à l’âge de 70 ans, il s’en retourna à Dieu. Ses funérailles furent célébrées en grande pompe ; l’église de Woippy, bien grande cependant, ne l’était pas pour la circonstance. La tenue parfaite, la piété, les fleurs de toute une population perdant non seulement un ami, mais un père, furent le plus éloquent des panégyrique. Vingt cinq prêtres, dont plusieurs archiprêtres et chanoines, étaient présents autour de l’archiprêtre de Saint-Vincent, qui présidait l’office funèbre.
Le cercueil du défunt disparaissant sous les fleurs et les couronnes fut porté de l’église au cimetière sur les épaules des conseillers de la fabrique et de la commune, car on n’avait pas voulu de corbillard. Au cimetière, l’ancien maire, M. Pierret, fit un magnifique éloge du défunt: « ...M. le curé, s’écria-t-il, ... si votre dévouement a été sans bornes, notre reconnaissance sera sans limites...! »
Dans la même sépulture repose le Père Marie Nicolas Boucheré (1846-1912), missionnaire au Su Tchuen méridional en Chine. Après ses études au Petit Séminaire de Montigny puis au Grand Séminaire de Metz, souhaitant se vouer à la conversion des peuples lointains, il rejoint le Séminaire des Missions-Etrangères à Paris en 1866. Ordonné prêtre en 1869, il embarque aussitôt pour la Chine où durant quarante ans, il sera missionnaire. En 1910, malade, il revient en France pour être soigné, mais meurt le 15 janvier 1912 à Woippy.
Les inscriptions sur le monument : - clic -

À côté, la tombe LEREBOULLET.
Sous le monument repose, entre autres, le corps de Marie-Zoé-Caroline, née le 5 juillet 1818.
Toute sa vie, elle soigna les malades du village. Pendant l’épidémie cholérique qui sévit en 1865 à Woippy, elle redoubla d’ardeur nuit et jour, allant d’un malade à l’autre. Elle établit à son domicile une petite pharmacie qui permit de sauver beaucoup de personnes. La fatigue qu’elle ressentit durant cette épidémie lui altéra la santé, et elle mourut le 3 août 1868. Nous pouvons lire sur le marbre « Elle a passé en faisant le bien et sa mémoire sera à jamais en vénération ». Sa sœur, Olympe, née en 1823 et décédée en 1896, continua son œuvre. « Elle a passé en faisant le bien » indique aussi son épitaphe.
Les inscriptions sur le monument : - clic -

Quelques pas plus loin, sur notre gauche, le cimetière de la famille SECHEHAYE, entouré d’une grille, qui contient plusieurs générations de cette famille.
La famille Sechehaye était une vieille famille de la bourgeoisie messine implantée à Woippy dès la Révolution par l’achat du vieux château et par la suite de la maison en Biche.
Cette famille donna à Metz et à la Moselle plusieurs magistrats, et à Woippy deux maires : Jean-Nicolas, de 1809 à 1811 et de 1836 à 1840, puis Paul (son arrière-petit-fils) de 1931 à 1939 et de 1945 à 1947.
« Né le 26 juillet 1893 à Briey, écrit Pierre Brasme (Woippy de 1871 à nos jours, Editions Serpenoise, Metz, 1994, p.163), Paul Sechehaye est le troisième fils du magistrat Jules-Ferdinand Sechehaye et de Louise Huet de Guerville. Après de brillantes études à Nancy puis à Paris, il s'engage en 1912 au 28e régiment de dragons à Sedan, et participe à la guerre de 1914-1918 comme maréchal des logis ; grièvement blessé aux attaques de Champagne, sa conduite au feu lui vaut deux citations à l'ordre de la division, la Médaille militaire et la Croix de Guerre.
Démobilisé, Paul Sechehaye est nommé attaché au secrétariat en chef de la sous-préfecture de Metz-Campagne, poste qu'il occupe jusqu'en 1926. Paul Sechehaye est surtout connu pour son engagement et son rôle dans les sociétés de préparation militaire ; pionnier du sport lorrain, il crée avec Robert Schuman et le docteur Michaux l'Union Jeanne-La-lorraine, dont il est président à vie; il fonde en 1922 l'Escadron du même nom, devenu par la suite Escadron de La Salle, société d'équitation, d'éducation physique et de préparation militaire. Lieutenant de louveterie de l'arrondissement de Metz-Campagne, Paul Sechehaye est en outre vice-président de la Fédération Départementale des Sociétés de Tir et de Préparation Militaire de la Moselle, et président de plusieurs sociétés woippyciennes, au premier rang desquelles l'Union de Woippy, fondée en 1925 »
Conseiller municipal en 1925, Paul Sechehaye est élu maire de Woippy en 1931 après la démission d'Alfred Mangenot. Il est réélu en mai 1935. Mobilisé en 1939, il rejoint le général de La porte du Theil et est nommé commissaire-chef de groupement des Chantiers de Jeunesse à Châtelguyon.
De retour à Woippy en avril 1945, il est réélu maire de la commune à l'automne suivant. Sollicitant un nouveau mandat deux ans plus tard, il est réélu conseiller municipal mais doit céder son fauteuil de maire à Ferdinand Jungling.
Paul Sechehaye meurt le 13 janvier 1975 au château de Woippy, la vieille demeure dont sa famille était propriétaire depuis la Révolution.

Le cimetière de la famille Sechehaye :
- Jeanne Sechehaye, née à Metz le 3 mai 1857, décédée à Nancy le 11 février 1885.
- Pierre Eugène Sechehaye, conseiller à la cour d'appel de Metz, membre du Conseil général de la Moselle et du Conseil municipal de Metz. Né le 8 novembre 1804, décédé le 5 octobre 1870.
- Thérèse Emilie de Mairesse, née le 21 août 1811, décédée le 1er février 1905.
- Paul Sechehaye, né à Thionville le 27 novembre 1834, décédé à Metz le 28 janvier 1844.
- Camille Lacroix, décédé le 23 août 1864 à l'âge de 21 ans, aux Andelys.
- Françoise Eléonore Olry, née en 1784, mariée en 1805, décédée le 12 juin 1820.
- Jean Nicolas Sechehaye, né en 1780, ancien juge de paix du ler canton de Metz, ancien maire de Woippy, décédé le 25 juin 1840.
- Charles Joseph Sechehaye, avocat à la cour royale de Metz, né le 6 septembre 1809, décédé à Metz le 16 mars 1842.
- Jules Ferdinand Sechehaye, conseiller à la cour d'appel, 1841-1908.
- Louise Victorine Fanny Sechehaye, née de Guerville, 1853-1912.
- Jean Sechehaye, 1885-1906.
- In Mémoriam Henri Sechehaye, né le 15 juin 1886, mort au Champ d'Honneur à Courbesseaux, le 25 septembre 1914.
- Anne Rémignon, née Sechehaye, 1929-1989 (fille de Paul Sechehaye).
- Paul Sechehaye, 1893-1975.
- Marie-Thérèse Sechehaye, née de Vial, 1898-1945 (première épouse de Paul Sechehaye dont il eut quatre enfants).
- Anne-Marie Sechehaye, née Dauzat, 1910-1997 (sa seconde épouse).

Nous allons nous diriger sur le côté gauche du cimetière Sechehaye pour découvrir les quelques très anciennes tombes sises au pied du mur nous séparant du nouveau cimetière.

Mais avant, une petite précision, le puits que l’on aperçoit sur le bord de l’allée aurait été transformé en ossuaire par délibération du Conseil municipal en avril 1936.


Tout de suite à gauche, une première sépulture, une pierre sculptée d’une croix en son dessus, ayant contenu les corps de Dominique STUREL et de Marguerite MARICHALE son épouse, décédés à 70 ans et 84 ans au XIXème siècle.
Et une seconde, adossée au mur, Jean-Pierre MARICHALE et son épouse Catherine SARE, décédés au milieu du même siècle, à des âges aussi fort avancés pour cette époque : 86 et 76 ans. Une inscription précise que ces derniers furent « bons époux, bon père, bonne mère, et qu’ils sont regrettés de leurs familles et de ceux qui les ont connus ».

À gauche, ceintes par une grille bien oxydée, trois tombes, elles aussi plus que centenaires. Un obélisque sis sur un piédestal couvre la sépulture de Joseph Eugène ROGET, notaire à Metz, (décédé d’une chute de cheval), le 5 novembre 1843 à l’âge de 27 ans ; sur le côté droit, une inscription : « A la mémoire de notre bonne et digne fille Anne Marie Philippine Eugénie ROLLAND née ROGET inhumée à Remilly le 3 juillet 1856 »
Devant les tombes de S.J.D.N. ROGET, ancien notaire à Metz, maire de Woippy (de 1842 à 1848), 1784-1864, (à droite), et de Anne SPIEGEL, épouse de J.D.N. ROGET, 1792-1878, (à gauche), ses parents.

À gauche de celles-ci, les deux tombes PÉCHEUR surmontées chacune d’un monument identique.
À gauche : Charles, doyen des présidents de chambre à la cour impériale de Metz, chevalier de la Légion d’honneur, né à Metz, le 27 janvier 1791 et décédé à Woippy le 29 octobre 1856 ; à droite, Jeanne-Victoire BEAUDOUIN, son épouse, décédée le 24 novembre 1845 à l’âge de 45 ans. L’épitaphe de cette dernière, plus que centenaire, et dont certains mots deviennent illisibles, mérite d’être reproduite.

Epitaphe de Jeanne-Victoire Beaudouin, épouse Pêcheur.
(Cette vue date de 1997)
De face : HONNEUR ET RESPECT.
Sous cette tombe qui sépare à toujours ceux qui étaient inséparables REPOSE Jeanne-Victoire BEAUDOUIN, épouse bien aimée de Mr C. PÉCHEUR président de chambre à la cour royale de Metz, chevalier de la Légion d'honneur, décédée le 24 9bre 1845 à l'âge de 45 ans dans sa campagne de Woippy. Dans la fleur de l'âge, sa belle santé a été détruite, et l'union la plus paisible, la plus heureuse, a été rompue. Distinguée par sa bonté, son inaltérable douceur, l'aménité de son caractère, la pureté de son cœur, la justesse de son esprit, la sagesse de ses pensées, la fermeté de ses principes religieux, ses sentiments charitables, sa modestie, sa simplicité, elle a comblé son mari de bonheur pendant 21 ans de mariage passés si rapidement. Elle fut un modèle de mère par ses soins attentifs, ses affections vigilantes. Tous répètent son éloge comme fille, épouse et mère. Elle emporte l'estime et la considération générales.
Que Dieu daigne la récompenser de ses vertus, et la juger digne de la couronne du martyre, par son cruel sacrifice et ses regrets déchirants de quitter à jamais son mari, ses trois fils, les êtres de toutes ses pensées, qu'elle aimait tant et qu'elle laisse isolés, inconsolables.
PRIEZ LE TOUT PUISSANT POUR ELLE

Sur la face arrière :
Qu’il lui a été cruel de quitter pour toujours son mari, ses trois fils chéris après avoir offert à Dieu ce sacrifice immense qui a déchiré son si bon cœur, elle n’a cessé de prier le 24 9bre 1845 alors que chacun la veille avait répandu avec tant de joie la nouvelle de sa guérison. Son âme s'est élevée vers le ciel.
PRIEZ DIEU POUR ELLE

Enfin, à la suite, quelques pierres tombales aussi centenaires.
Dans l'avant dernière sépulture, le défunt, Auguste LATTA, né en 1801, était originaire de Lyon.


Rejoignons la fontaine à droite de l’entrée du cimetière. De là, nous emprunterons l’allée qui longe le mur.
Sur notre gauche, les tombes militaires regroupant à ce jour 69 soldats français et 4 gradés de la guerre de 1870.


Inscriptions sur les trois colonnes :

ICI REPOSE FONTETTE SS LIEUTENANT AU 25 DE LIGNE TUÉ LE 10 .. 1870 A STE AGATHE

ICI REPOSE ARNEST AUDINOT NÉ A BASSUET (MARNE) SERGENT AU 25ME DE LIGNE BLESSÉ A LADONCHAMPS MORT LE 21 9BRE 1870
AGÉ DE 25 ANS

ICI REPOSE MÉRIEL-BUSSY CAPNE ADJT MR AU 25E DE LIGNE TUÉ AU COMBAT DE STE ANNE LE 17 8BRE 1870
Regretté de tous ses camarades

ICI REPOSE CAYEN CAPT AU 25ME DE LIGNE TUÉ A STE ANNE LE 7 8BRE 1870

Inscriptions sur les huit croix : Nombre de MILITAIRES FRANÇAIS - SEPTEMBRE 1870. Au total : 69.

Après quelque pas, arrêtons-nous un instant sur la tombe MANGENOT-NEU à notre droite, pour lire le nom d’Anne-Marie. En février 1926, sa maman avait fait quelques beignets pour le Carnaval et venait de placer l’huile encore bouillante sur le plancher, quand sa petite fille Anne-Marie, âgée de 4 ans, se précipita pour saisir un beignet et tomba dans le liquide. Grièvement brûlée, la pauvre petite fut immédiatement transportée à l'hôpital où elle décéda après 24 heures de souffrances.

Continuons notre trajet.
Arrivés à la jonction de l’allée suivante, nous apercevons plus bas, imposante et délaissée, une tombe en marbre gris tacheté blanc, c’est celle de la famille BUSY où repose Joseph Busy. Né à Woippy en 1856, il commence ses études au collège de Sierck, et à 17 ans entre à l’école d’Alfort d’où il sort vétérinaire à 25 ans.
De suite, il choisit l’Algérie pour exercer sa carrière et avec les Spahis, il fait campagne au M'Zab ; en garnison ensuite à Philippeville et Aumale, il revient en France à Tarascon au 11e dragons. Il retourne par la suite sur la terre d’Algérie, à Constantine et Blida. Totalisant 22 années en Algérie, il est nommé au 20e d'artillerie à Poitiers et obtient le grade de directeur du service vétérinaire au 2e corps à Nancy. Le 13 août 1914, il part avec l'état-major du général Foch pour la campagne de Belgique; en 1915, il est nommé vétérinaire principal inspecteur.
À l'Armistice, Joseph Busy se retire à Dijon, heureux de voir sa petite patrie retournée à la France. Travailleur, intellectuel autant qu'excellent technicien, il fait paraître plusieurs publications sur le service vétérinaire, pour lesquelles il reçoit des récompenses honorifiques. Officier de la Légion d'honneur en juillet 1896, il était également titulaire de la Médaille Coloniale, agrafe Algérie. Quelque temps avant sa mort, mû par une sorte de pressentiment, il revient au pays natal de son père et de sa mère, Woippy et Gandrange, où il prend soin de restaurer les tombes de ses aïeux auprès desquels il dort depuis 1925 en cette terre lorraine qui lui était si chère.
Joseph Busy était le fils de Joseph Busy, maire de Woippy de 1877 à 1881.

Remontons la petite allée située derrière nous.
La première tombe à gauche est surmontée d’un monument sur lequel on lit le nom de Jean Dominique PIERRET, chanoine à Metz, 1842-1915.
Jean Dominique Pierret est né à Woippy le 22 septembre 1842, et fut curé de Pournoy-la-Grasse et archiprêtre du canton de Verny. Il se retira à Metz en 1900. En 1909, il est nommé chanoine honoraire de la cathédrale.
Décède le 15 mai 1915, à Metz, rue du Grand Cerf, il est inhumé à Metz. C'est en février 1919 qu'il est ramené à Woippy.
Jean Dominique Pierret est l'un des deux parrains de la grosse cloche Rose de l'église de Woippy.

Continuons... et nous arrivons sur la tombe de Jean MANGENOT où on lit difficilement sur le marbre usé « officier de gendarmerie en retraite et ancien maire de Woippy, 1809-1877 ». Jean Mangenot est le premier maire de l’annexion allemande de 1871, nommé par le préfet de la Lorraine allemande. Mais préférant sacrifier sa position plutôt que de trahir ses sentiments français, il démissionne en 1874, prétextant que son fils étant sous-lieutenant dans l’armée française, il ne veut pas nuire à sa carrière. Jean Mangenot sera malgré lui reconduit dans ses fonction en 1876 et décédera le 21 juin 1877.

Dans la tombe suivante est enterrée Octavie MANGENOT, née le 26 janvier 1849, elle fut mise en terre en janvier 1940 à l’âge de 91 ans: elle était alors la doyenne de Woippy.

Puis on longe plusieurs sépultures LAPIED dont l’une est très originale avec sa poignée de mains. Sur la dernière, entre autres, les noms de Charles Lapied (1863-1931) et François Lapied (1889-1977), qui tous deux se vouèrent au sacerdoce.
Le premier est ordonné prêtre en 1886. Il est vicaire d’Audun-le-Tiche de 1886 à 1891, et devient curé d’Arraincourt en 1891 puis de Lessy de 1907 à 1919. Du 4 août 1914 au 18 novembre 1918, il est retenu en détention d’abord à Coblence, puis à Hunefeld et enfin à Fulda, en raison de son patriotisme français, ce qui lui vaut après la guerre les palmes académiques et la médaille de la fidélité française. En 1919, il devient curé de La Maxe. Contraint de quitter sa paroisse en 1930 à la suite d’une crise d’apoplexie, il se retire chez son neveu, François Lapied, curé de Magny. Il meurt à Sainte-Blandine le 21 novembre 1931.
Le second, François Lapied, est ordonné prêtre en 1914, il part aussitôt comme infirmier sur le front russe. Après la guerre, il est nommé prêtre à Hattigny (près de Sarrebourg), puis à Magny jusqu’en 1959. Devenu aumônier au Home de Préville, il se retire ensuite à Queuleu.
Ses connaissances étendues étaient appréciées et il aimait à donner sur les sujets les plus divers un avis d’ailleurs autorisé. Passionné d’astronomie, membre du Tribunal de la rote (tribunal d’appel ecclésiastique pour les affaires matrimoniales), il fut en outre professeur de mathématiques au Grand Séminaire où il compta parmi ses élèves le futur évêque de Metz, Monseigneur Schmitt.
C’est d’ailleurs ce dernier qui vint à Woippy célébrer la cérémonie funèbre de l’abbé Lapied le 7 février 1977.

Achevons l’allée et tout de suite descendons la suivante.
Nous apercevons sur notre gauche, une série de tombes, toutes très anciennes. Elles étaient à l'époque, adossées au mur de l'ancienne église dont on entreprit la démolition quelques années après l'inauguration de l'église actuelle, en conservant toutefois son clocher en souvenir. Et ceci jusqu'à la fin 1904 où il fut à son tour démoli.

Dans les six premières repose la famille Pécheur. La plupart des épitaphes étant très usées par le temps, elles sont reproduites ci-dessous :

Première : Ici repose Michel Joseph PÉCHEUR, ancien président de la chambre des notaires de Metz, décédé à Pange le 30 octobre 1889 à l’âge de 69 ans.
Ici reposent Madeleine Suzanne Charles de HURUT, veuve de M. PÉCHEUR, conseiller à la cour de Metz, décédée à Woippy, le 10 mai 1858 dans sa 75ème année.
Anne Félicité PÉCHEUR, décédée le 10 juillet 1832 à l’âge de 18 ans.
2ème : Ci-gît Marguerite LANSEMANT, épouse de M. PÉCHEUR, président de la cour d’appel de Metz, décédée le Xbre 1826 à l’âge de 74 ans.
Elle fut le modèle des épouses et des mères. Une rare piété, la charité envers les malheureux, une pratique constante de toutes les vertus ont rempli tous les instants de sa vie. Priez pour le repos de son âme.
3ème : Ci-gît Jean Baptiste Pierre PÉCHEUR, décédé le 9 mars 1819, âgé de 40 ans. Capitaine d'Artillerie, Chevalier de l'Ordre Royal et de la Légion d'Honneur. Priez Dieu pour le repos de son âme.
4ème : Sous cette tombe reposent les cendres de Jean-Pierre PÉCHEUR, président de la cour d’appel de Metz, chevalier de la légion d’honneur, décédé le 21 août 1808 à l’âge de 57 ans.
Et de François Victor PÉCHEUR, son fils, doyen des conseillers de la cour royale de Metz, chevalier de la légion d’honneur, décédé le 13 février 1839 à l’âge de 57 ans.
5ème : Famille Pécheur.
6ème : (marbre cassé), [José]phine PÉCHEUR, décédée le 1er juillet 1827, âgée de 9 ans.

En face de la dernière tombe Pécheur, celle d’Alfred MANGENOT (1873-1958).
Alfred Mangenot est né quelques années seulement après l’annexion, le 19 octobre 1873. Après s’être distingué à l’école communale, il aide son père dans son exploitation agricole car chez les Mangenot, on travaillait la terre « de père en fils ». C’est pendant ces travaux champêtre que son père lui insuffle l’amour de la patrie absente et il restera toute sa vie durant un ardent patriote et un propagateur acharné de l’idée française. Dès 1908, il fait partie de la petite équipe locale du Souvenir Français dont il assurera par la suite la présidence. Actif et toujours serviable, il cherche un champ d’activité plus vaste et en cette même année, les Woippyciens lui témoignent leur confiance en l’envoyant siéger au conseil municipal dont il est alors le plus jeune membre. Adjoint au maire en 1914, il est nommé maire en mars 1917, fonction qu’il conserva jusqu’en juin 1931, époque à laquelle il se retire définitivement de la vie publique. Mais il n’en reste pas moins un ardent défenseur de la paysannerie lorraine : c’est lui, en effet, qui fonde la caisse de Crédit Agricole de Woippy, et pendant de longues années, il en sera le dévoué président dont on apprécie les conseils. C’est en reconnaissance de ses inappréciables services à la Caisse Agricole qu’il est nommé officier du Mérite agricole. Lors de la deuxième annexion allemande, il est expulsé dans le département du Tarn où jamais il ne désespéra de retrouver son village natal de Woippy.

Continuons notre marche...
Sur notre gauche, parmi les très anciennes tombes, l’une possède sur son fronton une belle sculpture très bien conservée : au milieu, une croix dont un bras supporte une lampe, au pied de la croix, un vase et une jarre, et une échelle élevée ; à droite un arbre fruitier (pommier ?) avec un serpent enlaçant le tronc ; à gauche, une corbeille contenant des outils, un faisceau surmonté d’un coq, un oriflamme ou une lance (?) et un essaim.
L’un des corps de cette tombe a été inhumé le 16 janvier 1789, veille de la Révolution française.

Plus bas, toujours à gauche, entre deux sépultures anciennes dont il ne reste aucune épitaphe : Rose MARCUS.
Pour les Woippyciens d’aujourd’hui, son nom est celui d’une rue de Woippy en face du lavoir. Mais à l’origine Mlle Rose Marcus fit édifier à ses frais, entre 1848 et 1850, la nouvelle église de Woippy sur un terrain lui appartenant et en fit don à la commune.
Une plaque commémorative à l’entrée de l’église, à droite sous le porche, rappelle cette oeuvre de bienfaisance.
Rose Marcus avait hérité d’une grande fortune après le décès de ses parents, frères et sœurs.

(Photographie Pierre Brasme)
À sa mort, elle était propriétaire, entre autres, de la ferme de Saint-Eloy où est situé aujourd’hui le supermarché Mammouth-Auchan.
Remarquons que le marbre sur lequel est gravée l’épitaphe est de facture récente, il a été remplacé après que l'ancien se soit décollé et brisé en tombant sur la pierre tombale. Cette plaque de marbre, non d'origine, indiquait : « Ci-Gît Demoiselle Rose Marcus décédée le 15 8bre 1855 à l’âge de 62 ans... etc... ». Le jour était déjà faux, elle est décédée le vendredi 5 octobre 1855 à 5 heures du soir. L’inscription indique maintenant 15 août 1855. À quand la date exacte ??
Les erreurs se perpétuent au cours des années ; à l'extrême, un jour la plaque sera exacte et l'acte d'état civil faux !... Pour éviter cet amalgame, voir l'acte de décès de Marie Rose Marcus : - clic -
A l'époque et encore utilisé aujourd'hui par certaines personnes âgées, les derniers mois de l'année étaient abrégés comme suit :
7bre pour septembre,
8bre pour octobre,
9bre pour novembre,
10bre pour décembre.

En face de Rose Marcus, la tombe de la famille BIGEREL, surmontée d’un crucifix dont les deux branches de la croix supportent un linceul.
C’est ici que repose l’abbé Henri Bigerel, curé de Woippy de 1912 à sa mort en 1923.
Fils d’instituteur, il est né à Marthille (près de Morhange) le 8 mars 1869. Ordonné prêtre le 14 juillet 1895, il est nommé vicaire à Saint-Ségolène, puis curé de Gandrange-Amnéville en 1899, avant de présider aux destinées de la paroisse de Woippy à partir du 2 octobre 1912, en remplacement du curé L’Huillier nommé archiprêtre.
L’abbé Bigerel est décédé le vendredi matin 27 février 1925, à l’âge de 56 ans, après une longue maladie. Il s’est vu mourir un peu plus tous les jours, le mal qui le conduisait infailliblement au tombeau lui laissant, jusqu’au dernier moment, toute la lucidité d’un esprit qu’il avait vif et solide à la fois.
Le jour de ses obsèques, le 2 mars, la paroisse et la commune l’honorent en faisant à leur défunt pasteur d’inoubliables funérailles. Ce qui frappe surtout la foule, c’est la participation d’environ 85 prêtres et religieux dont le vicaire général Siebert qui fait l’oraison funèbre. Au cimetière, le maire, M. Mangenot, dit en termes excellents, très courts, un adieu ému au curé de Woippy qui, pendant 13 ans « fut pour nous un bon père de famille aux jours de joie comme aux jours de tristesse ». M. Demange, président du Conseil de fabrique rappelle le zèle du pasteur pour la jeunesse et toutes les œuvres paroissiales.

À gauche de cette tombe, il est impossible de ne pas remarquer une plaque récente comportant quatre prénoms d'une même famille : François 1958-1975, Bruno 1960-1982, Vincent 1957-1984, Benoît 1967-1986. Tous accidentés de la circulation.
Les trois premiers frères reposaient en haut de l'allée, le regroupement est récent.
Perdre un enfant n’est pas dans l’ordre naturel des choses...
Et il me vient à penser à cette fin d’après-midi de novembre 1964, route de Thionville, où le frère et la sœur G. se faisaient tuer en voiture en revenant du travail, et qui reposent au bas du cimetière près de l’entrée. Puis aux deux frères M., là-haut dans le nouveau cimetière, morts tous les deux en mars 1981, la même nuit et ensemble, aussi dans un accident de la route...
Ce ne sont pas les seuls enfants ou jeunes hommes reposant dans ce cimetière... malheureusement...

Avançons !
Au bas de l’allée à droite, nous découvrons contre le mur de la route, quatre anciens monuments datant du début du XIXe siècle, qui furent à l'époque ceints par une grille dont il subsiste quelques vestiges très attaqués par le temps.
Ces quatre sépultures, dont les épitaphes sont tout juste lisibles, rassemblent les membres d’une même famille tout au long du XIXe siècle. Le troisième monument à partir de la gauche comporte une plaque particulièrement émouvante :

Michel DELATTE
agriculteur, honoré de l’estime générale
21 mai 1816 - 31 janvier 1885
---
Mélanie METHLIN
son épouse victime de l’amour maternel
13 janvier 1821 - 1er mai 1872
---
Nicolas Etienne DELATTE
leur fils victime du devoir accompli
25 décembre 1848 - 14 janvier 1871

( C’était la guerre franco-allemande de 1870 : Nicolas Delatte, soldat au 2e régiment d’artillerie, est mort du typhus en captivité au camp de Stettin en Pologne.
Sa maman n’aura pas eu la force de surmonter son chagrin.
)

La dernière inhumation date de 1901. Les épitaphes sont de moins en moins lisibles, les voir : - clic -

Nous allons maintenant longer le petit mur qui nous sépare de la partie basse du cimetière.
Entre les quelques tombes accolées à ce mur, celle de la famille HACQUARD. Parmi les noms, Marcel Hacquard, 1896-1944.
Lors de la défense de Metz par l’armée allemande en 1944, de la main-d’œuvre est réquisitionnée pour creuser des tranchées antichar et pour d’autres travaux de terrassement, ce sont les « Schanzen ». Marcel Hacquard est de ceux-là.
À la fin janvier 1945, on retrouve 5 corps de Schanzer dans la forêt de Bermering (près de Morhange), couchés l’un sur l’autre et tués d’une balle dans la nuque. On identifiera un certain Marcel Hacquard, de Woippy, il avait 48 ans.

Arrivés au bas de l’allée principale, un petit escalier mène à la partie du cimetière située en contre bas. Nous n’irons pas, ce n’est pas l’itinéraire.
Mais vous savez ! Le Père Tranquille ! Noël-Noël ! « Le Père Tranquille », le film qui sortit en 1946 et relatant un épisode de la Résistance, eh bien... il est là ! On aperçoit sa tombe. Non, pas Noël-Noël ! Mais Ernest KEMPNICH, le propriétaire du « Cyclamen ». Le film a été tiré de son action durant la Seconde Guerre Mondiale, la Résistance, les Réseaux d’évasion, etc.
Ernest Kempnich est né en 1882. Dans sa jeunesse, il travaille chez des horticulteurs à Ban-St-Martin, Metz, Nancy puis Paris. C’est là qu’il apprend la culture des orchidées. Il se rend en Angleterre, dans le Middlesex, où il apprend les secrets de la culture sous serres.
Il quitte l’Angleterre pour Metz, puis peu après achète, en 1908, sur la route de Thionville, une propriété. Ce sera « Le Cyclamen »: c’est là qu’il cultivera les orchidées et les cyclamens pendant près d’un demi siècle. Lors de la Deuxième Guerre Mondiale, Ernest Kempnich est dans la Résistance et devient membre d’une filière d’évasion. En mai 1944, les usines Hobus, route de Thionville, sont bombardées et sa propriété est en partie détruite. A la Libération, il est nommé adjoint au maire de Metz. En 1947, il est élu sur la liste gaulliste de Raymond Mondon et accomplira son mandat municipal jusqu’en 1959, date à laquelle il se retire à Scy-Chazelles pour s’occuper de ses serres.
Ernest Kempnich meurt le 1er janvier 1978.

Nous avons vu dans l'allée précedente des sépultures de prêtres ; plusieurs enfants de Woippy se sont voués à la religion.
Tenez, dans cette petite partie du cimetière en contre-bas, non loin de l'escalier, cette haute tombe de couleur noire renferme le corps de Marcel BECKER. Il est élève de troisième au Petit Séminaire de Montigny lorsqu'il tombe malade. Il décède dans sa dix-huitième année en mars 1938. C'est le chanoine L'Huillier, ancien curé de Woippy de 1902 à 1912, supérieur du Petit Séminaire qui célébre les obsèques en l'église de Woippy.
Citons aussi le Révérand Père Pierre-Victor LAHAIRE, né à Woippy en 1888 et décédé en 1918, son père était manoeuvre.
Et reposant en haut de cette grande allée, dans l'emplacement Keller, Paul-Marie KELLER, curé archiprêtre de Vigy, né à Saint-Eloy en septembre 1881 et décédé en 1940. Ses parents, Marie Aloïse Keller et Adeline Bertard, cultivateurs, sont les donateurs de la petite cloche Marie-Adeline (967 kilos) de l'église de Woippy.
Non originaire de Woippy, l'abbé Jean Marie GUIOT, né en 1913, décédé en 1987. En dernier curé de Thimonville, il repose en haut de cette grande allée à droite.
Leur sépulture ne sont pas dans ce cimetière, mais citons quand même Paul GUSSE devenu Cher Frère Arpin-Paul, décédé en 1938 à Epernay à l'âge de 23 ans, des suites d'une opération de l'appendicite ; Louis GÉNY, devenu Cher Frère Attale-Charles, décédé fin février 1959, à l'âge de 42 ans : Préfet de discipline de l'Institution de La Salle, à Queuleu, il accompagnait les élèves à la séance spéciale du film « Les dix commandements » donnée au cinéma Eden. La représentation tirait à sa fin lorsque le cher Frère Attale-Charles s'affaissa sur son siège. Tout secours fut inutile.
Pour ne pas créer de malentendu inutile, qui dit « enfants » dit aussi « filles ». Citons Mlles Madeleine BODA, Emilienne GUSSE, Alice KLEMAN, Marguerite SCHWARTZ, Marguetite ZIMMER, toutes à ce jour décédées.
Dans un temps assez lointain, rappelons le souvenir de Catherine GUSSE, née à Woippy le 14 octobre 1842 (fille de Louis Gusse et Madeleine Remiatte), décédée le 14 juillet 1920 à Longwyon, sous le nom de Sœur Sainte Anthelme.
Terminons la liste avec Mlles Gabrielle MANGENOT, Alexandrine HUMBERT, Monique VIZÉ et Ghislaine SCHMITT, toutes, de ce monde.

Bien ! Commençons à remonter cette allée où jadis se situait l’ancienne église.


À droite, un monument assez imposant, la sépulture BAUGENEZ-FENOT.
Nous lisons en la partie supérieure, sous la croix, « A notre fils bien aimé », puis sous le fronton : Joseph Baugenez, décédé le 5 février 1901 à l’âge de 21 ans; et Joseph Baugenez (père) 1850-1905. Au bas du monument : Mélanie FENOT, épouse de Joseph Bogenez (1855-1926). C’est elle qui fit construire la grotte de Lourdes située devant l’entrée de l’église. Ayant son fils malade, elle fit le pèlerinage à Lourdes en promettant à la Vierge de faire ériger une reproduction de la grotte de Sainte Bernadette à Woippy si son fils guérissait. Son fils mourut et... la grotte fut quand même construite.
En 1940, Mélanie s’est sûrement retournée dans sa tombe : une compagnie de SS apercevant la statue de sainte Bernadette devant la grotte la prirent pour celle de Jeanne d’Arc. Ils l’enlevèrent de son socle et la poussèrent à coup de pieds à travers les rues du village et la décapitèrent.
Après la guerre, une nouvelle statue fut achetée, et le premier dimanche de décembre 1954, elle fut bénie au début de la messe par l’ancien curé de Woippy l’abbé Guénot, assisté de l’abbé Bémer. A l’issue de la messe les pompiers qui fêtaient la Sainte-Barbe, leur patronne, déposèrent la statue sur sa stèle devant une assistance émue qui entonna spontanément un vibrant Magnificat.

Quelques pas plus haut, à gauche, plutôt abandonnée, la sépulture des sœurs de Woippy.
Des noms... Zénobie (née Marie Grandidier) (1830-1870), Andrée Marie (1894-1927) et Séraphine-Joseph, (née Marie-Elisabeth Thiry, (1862-1937).
Depuis le milieu des années 1800, des sœurs de la Congrégation du Couvent de Peltre étaient envoyées à Woippy (et dans bien d’autres villages) comme institutrices ou comme infirmières. Elle logeaient à l’étage de l’école des filles (école Jacques Prévert). Les sœurs ont quitté Woippy à la fin des années 60.

Deux emplacements plus haut, la tombe OBELLIANNE dont les sculptures des deux monuments, et surtout les lettres des épitaphes gravées en relief et en gothique, donnent à l’ensemble un beau cachet.
Parmi les noms, Pierre Obellianne, 1810-1888, a été maire de Woippy de 1848 à 1853.
Jouxtant cette tombe, la dernière demeure du général GIBON sur laquelle, depuis la création de la section du Souvenir Français de Woippy en 1910, beaucoup de gerbes ont été déposées lors de l’anniversaire de la bataille de Ladonchamps du 7 octobre 1870, bataille qui en fait ne fut qu’une opération de fourrage qui se solda par un échec et la perte de 1257 hommes parmi lesquels 61 officiers et trois généraux dont le général de brigade Gibon qui décédera le 19 octobre des suites de ses blessures. Emile Armand Gibon avait 57 ans. Ancien colonel, il n’était général que depuis le 20 septembre ! Il avait remplacé le général de Marguenat tué lors de la bataille de Rezonville le 16 août. Le maréchal Canrobert, commandant le 6e corps, était présent lors de ses funérailles.
Le général Gibon était, entre autres décorations, chevalier de l’ordre de la Légion d’honneur, et officier et commandant de l’ordre impérial de la Légion d’honneur.

Il faut peu de doigts pour compter les titulaires de Légion d’honneur reposant dans ce petit cimetière de village, aussi, pourquoi ne pas citer avec fierté, à quelques tombes plus haut, sur notre droite, Camille THIRIET
Fait prisonnier en 1943 par les Allemands parce que ses deux fils se sont soustraits à l’incorporation dans l’armée allemande, Camille Thiriet est enfermé dans le camp de Woippy puis au fort de Queuleu où il restera jusqu’à la Libération de Metz. Invalide des suites de sa détention, il était titulaire de la Médaille militaire, de la Croix de guerre et de la Légion d’honneur. Il fut aussi conseiller municipal et durant 30 ans, président du Conseil de Fabrique. Il est décédé début juillet 1977 à l’âge de 76 ans.

Et nous voici en haut de cette allée principale !
À droite, la tombe de la famille KELLER. La famille Keller était propriétaire de la ferme de Saint-Eloy.
Sur la pierre, plusieurs noms dont Julie Keller, 1879-1923 et Charles Keller 1876-1952.
Mme Keller, née Kempnich, est une fille de cultivateur. De son union avec Charles Keller, elle a douze enfants, six filles et six garçons, et se voit décerner la Médaille d’Or de la Maternité.
Quelques semaines avant sa mort, se sachant mortellement atteinte, elle fait le dur et lointain pèlerinage à Lourdes mais Dieu reste sourd à ses prières et elle décède le 25 octobre 1923 dans sa 45e année après 14 mois de maladie.
Lors de ses obsèques, une foule immense accourt, dont de nombreux cultivateurs du Pays messin. Une trentaine de prêtres se sont associés à la douleur de la famille, en partie en témoignage d’amitié pour l’abbé Keller, beau-frère de la défunte. Mais l’affluence des femmes est surtout considérable : fermières des environs et du pays, et surtout les femmes et mères chrétiennes de Woippy dont la défunte était l’une des meilleures secrétaires. M. Sechehaye, adjoint au sous-préfet de Metz-Campagne, représente le préfet et le sous-préfet retenus. L’épouse de M. le préfet, Mme Manceron, a tenu à se joindre à l’assistance. La levée du corps à la ferme de Saint-Eloy est faite par l’abbé Lapied, curé de La Maxe ; le chanoine Louis Muller, entouré du clergé, reçoit le corps à l’entrée de Woippy; l’abbé Bigerel, curé de Woippy, chante la messe de Requiem et l’archiprêtre de Château-Salins donne l’absoute. La chorale de Woippy exécute le plain-chant de la messe et les motets pour les morts avec autant de savoir que de piété. La foule toute entière accompagne au cimetière la dépouille mortelle de cette mère de famille qui laisse douze orphelins.

Derrière l’emplacement Keller, à droite, une tombe sur laquelle brille en lettres d’or le nom de Pierre KOPP.
La cité des Fraises lui doit beaucoup ! Ce serait lui faire offense de ne pas s’arrêter un instant devant son nom, mais comment en quelques phrases, résumer toute sa vie ?
Avant la Deuxième Guerre Mondiale, Pierre Kopp est un sportif ardent, plusieurs fois champion de course à pied. Il est membre de l’Union de Woippy en tant que moniteur adjoint d’éducation physique et de gymnastique dont les sections d’Adultes et de Pupilles prennent part, avec succès, aux concours de Lorraine, d’Alsace, à Nice, à Paris et ailleurs. Pendant la guerre, il travaille aux usines Hobus et de ce fait, réussit à libérer les 540 détenus du camp de prisonniers de Woippy dans la nuit du 31 août au 1er septembre 1944. Recherché par la Gestapo, il se réfugie à Metz. Dénoncé, il est arrêté et emprisonné à Metz. Heureusement la libération de Metz est imminente, il échappe au sort qui lui était réservé.
Après la guerre, il est du Souvenir Français, des Anciens Combattants, des Engagés Volontaires, des Malgré-Nous, des Déportés, du Progrès, du Football, et surtout de l’Union de Woippy.
La Fête nationale, le Fête des fraises, la Fête patronale, les anniversaires des Victoires et des Combats sur le territoire de Woippy, tous les festivals, les bals, les soirées théâtrales de l’Union, les manifestations agricoles, les congrès, et... les démarches, les organisations, les traditions, les drapeaux, les lampions, le matériel, c’était lui ! Toujours lui !
Laissons de côté toutes ses médailles...
« Adieu Pierre Kopp ! », c’est en ces mots que M. Sechehaye, président de l’Union de Woippy, termina son panégyrique devant une foule émue, en ce mois de juillet 1964.

Nous allons rejoindre la partie du cimetière située devant nous en contre bas, mais au passage, une tombe : famille BODA.
Ici repose à tout jamais Joseph Boda.
Joseph Boda a tenu les orgues de l’église durant plus de 65 ans. Né en juin 1866, il est tout de suite attiré par la musique et prend ses premières leçons auprès de M. Diess, professeur de grande réputation qui enseigne chez les Jésuites. A 16 ans, il débute aux orgues de l’église de Woippy et il gardera cette fonction jusqu’à sa mort le 14 janvier 1950.
Il fut chef de la Société de musique « Saint-Etienne », il fut également l’un des promoteurs de l’Union de Woippy. Il fut également conseiller municipal pendant de longues années. Joseph Boda était cordonnier, métier maintenant bien rare !

Après avoir franchi la déclivité qui mène à la grande allée centrale bordée d’arbres, gravissons les quelques marches d’accès au nouveau cimetière, mais nous n’irons pas plus loin.
En regardant sur notre gauche entre les arbres qui bordent l’allée, au loin, on aperçoit un monument de pierre de Jaumont dressé sur une tombe. Ce monument, sur lequel les quatre âges de la vie apparaissent en bas-relief sur fond de saisons changeantes (description ci-dessous), a été réalisée par le sculpteur Bernard Copeaux pour son père Paul COPEAUX.
  - Le printemps, c'est l'air symbolisé par le papillon du renouveau sorti de la chrysalide. Il déploie ses ailes comme le corps d'un violon -instrument que jouait Paul Copeau et qui berça la jeunesse du sculpteur- et sa queue se termine en plume sergent-major calligraphiant le nom de Copeaux.
  - L'été, le feu brûle les épis de blés entre deux demi-lunes et deux chouettes. Au sommet, le soleil darde de ses rayons et, au centre de la boule de feu, la roue de la vie à trois branches que l'on retrouve dans les symboles celtiques, au Mexique, en Inde, en Bretagne. Toute cette allégorie naît de la carapace de la coccinelle, la « bête à Bon Dieu ».
  - L'automne sera la terre avec deux cœurs entrelacés prenant leurs racines d'un cep de vigne. La vie que l'on picore, que l'on grappille comme ces oiseaux dans les raisins... amers, de la joie ou de la colère.
  - L'hiver, le bas-relief mêle l'image du père au souvenir d'enfance du bonhomme de neige, avec sa pipe, son chapeau, sa pelle, mais pas de balai... un cœur sur la main. Ici la roue de la vie est remplacée par un cristal de neige. Mais, en y regardant de plus près, on découvre qu'il est fait de six petites niches que les enfants confectionnent en décembre pour aider les oiseaux à passer, à l'abri, la plus rude saison.

( Cette description a été réalisée par R. BANCE dans le Républicain Lorrain du 6 mai 1986)
Né à Peltre le 7 janvier 1905, Paul Copeaux, à qui une grande majorité de la population de Woippy doit son instruction primaire, a été successivement instituteur à Pommiers (Pas-de-Calais), à Nilvange, à Sierck et à Russange avant d’être nommé à Woippy en 1932.
Sportif accompli, à son arrivée à Woippy il crée une section Pupille de gymnastique à l’Union de Woippy. Cette section affirme une valeur toujours accrue à Nancy en 1933, à Algrange en 1934, à Epinal en 1935. Après quatre années d’existence, cette section se classe comme meilleure section de pupilles de l’Union Jeanne-La-Lorraine. Secondé dans sa tâche par Emile Lamort et Pierre Kopp, en 1937, c’est l’apothéose avec le championnat de gymnastique de Paris.
Après la guerre, il est élu conseiller municipal en 1947. Il est adjoint au maire en 1953. Promu directeur de l’école de garçons en 1949, il prend sa retraite en juillet 1967 après avoir consacré plus de 40 ans à l’éducation de la jeunesse.
Décoré de la Médaille d’honneur de bronze de la Santé publique, de la Croix de Guerre avec étoile d’argent, officier des Palmes académiques, Paul Copeaux décède le 4 novembre 1985. Une salle Paul-Copeaux à l’Hôtel de Ville de Woippy a été inaugurée en décembre 1990 en présence de son épouse.

Descendons les escaliers et avançons dans l’allée centrale.


À gauche, sous le deuxième arbre, au bord de l’allée, la tombe de Paul STRUNCK.
Paul Strunck est né le 2 mars 1909 en Meurthe-et-Moselle. En 1925, il vient se fixer dans notre localité. En 1930, alors qu’il travaille à Rombas, il est victime d’un accident qui lui coûte le vue. Il faut se reconvertir. Il fabrique des brosses et des chaises et exerce aussi la profession de rempailleur en faisant du porte-à-porte. En 1950, il fonde l’Association des chiens guides des aveugles. Paul Strunck est décédé le 28 novembre 1968.

Continuons notre marche. Une dizaine de mètres plus bas, à droite, au bord de l’allée, la tombe de Paul SIMON.
C’est avec cette tombe que les Woippyciens prennent conscience du drame algérien... Paul Simon, du 18e régiment de chasseurs parachutistes, est tombé le 12 juin 1957 au champ d’honneur en Algérie.
Ce n’est que le jeudi 5 septembre 1957, à 8 h 30, que son corps est remis à sa famille devant l'église paroissiale, escorté par un détachement d'honneur du 6e train, commandé par un aspirant. Le corps des sapeurs-pompiers dont le défunt faisait partie, avec à sa tête le lieutenant Hubsch, ont organisé la réception d'une façon impeccable.
À 10 heures, la messe de Requiem, chantée par l'abbé Bemer, curé de la paroisse. L'église de Woippy s'avère trop petite pour contenir tous les amis de la famille. Le catafalque, orné de la Médaille militaire et de la Croix de guerre, disparaît sous un véritable amoncellement de couronnes et de gerbes, pendant que quatre pompiers observent pendant tout l'office un impeccable garde-à-vous. La chorale dont le défunt avait été membre, met tout son cœur dans l'exécution de chants émouvants. Et lorsque M. le curé prend la parole pour tirer la morale du sacrifice de notre jeune compatriote, les plus endurcis ont bien de la peine à cacher leur émotion.
Parmi la nombreuse assistance, M. Jungling, maire, entouré de ses adjoints et du Conseil municipal ; M. Hambourger, commandant la brigade de gendarmerie de Metz ; le corps enseignant au complet, les présidents de toutes les sociétés locales, les enfants des écoles, etc.
À l'issue de la messe, le cercueil recouvert d'un drapeau tricolore est hissé sur la pompe des sapeurs-pompiers et, précédé par dix drapeaux des sociétés patriotiques, parmi lesquels ceux de la Résistance, de la J.O.C., de l'U.N.C., de la Relève, se dirige, suivi de toute la paroisse dans un silence impressionnant, vers le cimetière où le maire a des paroles émouvantes pour retracer la vie trop brève du défunt.
La triste nouvelle de la mort de Paul Simon était parvenue l’avant veille de la Fête des Fraises à la municipalité qui, en signe de deuil, avait décidé de supprimer les réceptions officielles à la mairie. Dans la matinée du dimanche, le souvenir du jeune soldat fut évoqué et lors du dépôt de gerbe au monument aux morts, une minute de silence observée à sa mémoire. La fête des Fraises fut marquée d'une certaine retenue.

Malheureusement, la famille de Paul Simon ne devait pas être la seule à être touchée par les événements d'Algérie...
Le mercredi 16 avril 1958, c'est le corps du sergent-parachutiste Hubert COLINET que l'on conduit au cimetière.
Il a été tué le 25 février dans la région de Tebessa. Lui aussi a droit à d'émouvantes obsèques, des médailles aussi ornent son cercueil, la Médaille militaire, la Croix de la Valeur militaire avec palme, la Médaille commémorative des opérations en Afrique du Nord. Mais sa maman les voit-elle ? Cette pauvre femme a déjà perdu son mari en 1940, au début des hostilités. La tombe se situe un peu plus bas contre le mur de l’ancien cimetière.
Une semaine plus tard, le jeudi 24 avril 1958, c'est au tour du sergent-chef Lucien MANGENOT d'être porté en terre.
Il est tombé le 18 mars alors qu'il participait à une opération avec un groupe du 2e Régiment de Parachutistes Coloniaux. Pour lui aussi, un hommage solennel est rendu ; les médailles aussi, parmi lesquelles on remarque la Légion d'honneur, accompagnent le catafalque. La tombe est située plus bas, à gauche, près du mur. Sur celle-ci, une photographie représente Lucien Mangenot en uniforme.

Oui ! Sur les quelque 30 000 militaires qui laissèrent leur vie en Algérie, trois d’entre eux étaient Woippyciens.

La tombe de Paul Simon contient aussi le corps d’André DEBS, ancien maire de Woippy.
Fils d’une vieille famille mosellane, André Debs est né à Woippy le 19 août 1912. Il suit ses études secondaires au lycée Fabert de Metz. Homme de lettres et helléniste distingué, il est nommé secrétaire de mairie à Woippy le 1er janvier 1940. Fonction qu’il occupe jusqu’au 31 décembre 1946. Pendant la Seconde Guerre Mondiale, il prouve ses qualités de cœur et de caractère, ainsi que son patriotisme et sa bravoure en assurant un ravitaillement convenable à la population locale et étrangère. Il met sur pied un réseau d’évasion des prisonniers de guerre fuyant l’Allemagne et un autre réseau pour les Lorrains réfractaires à l’armée germanique.
En novembre 1947, il est élu conseiller municipal et dès lors, se consacre aux affaires communales au sein de nombreuses commissions. La confiance acquise auprès de la population lui est renouvelée en mars 1959, date à laquelle il est élu maire de Woippy. Durant son élection, il travaille à l’extension et à la modernisation de la commune. On lui doit le groupe scolaire du quartier du Roi, l’agrandissement des écoles maternelles dans les quartier du Roi et du centre, le groupe scolaire Pierre et Marie Curie et les deux collèges actuels. A ce titre, il est nommé chevalier dans l’ordre des Palmes académiques en 1972. Signalons encore la construction de la salle des fêtes Saint-Exupéry et la mise en chantier de l’hôtel de ville actuel.
André Debs est réélu en mars 1965 et en mars 1971, mais il ne terminera pas son troisième mandat car il décède le 2 avril 1976, dans sa soixante-quatrième année, lors d’une hospitalisation à la clinique Claude Bernard alors que rien ne laissait présager une fin aussi brutale.

Nous allons continuer à descendre, et dans l’avant-dernière petite allée transversale de gauche, près du mur d’enceinte, le caveau JUNGLING.
« Ferdinand Jungling voit le jour à Woippy le 28 janvier 1901, écrit Pierre Brasme, après des études primaires à l’école communale du village, il entre chez les Frères des Ecoles Chrétiennes à Metz. Il accomplit son service militaire au 26e R.I. de Nancy, durant lequel il participe à l’occupation de la Rhénanie, à Mayence, en 1922. Mobilisé en 1939 sur la Ligne Maginot avec le grade de sous-lieutenant, il est fait prisonnier le 20 juin 1940. Il est libéré le mois suivant en tant qu’Alsacien-Lorrain et rentre à Woippy. Après la guerre, il est élu maire de Woippy le 30 octobre 1947. Réélu en 1953, il ne se représentera pas aux élections de 1959. Il sera remplacé par M. Debs. Ferdinand Jungling, décède le 1er décembre 1967 à l’âge de 66 ans ; il était aussi directeur retraité de la Solocomet à Maizières-lès-Metz. De son mariage en 1925 sont nés cinq enfants ».

Dans la dernière allée transversale de droite, arrêtons-nous un instant sur la tombe de Mme Alice CROUSSE, 1892-1984. C’est elle qui a aidé, pendant des décennies, à mettre au monde plus d’une génération de Woippyciennes et Woippyciens.
Marie-Alice Mouchot est née le 1er avril 1892 à Bourgaltroff en Moselle. Sage-femme de profession, elle a exercé à Woippy pendant plus de cinquante ans. Elle a été également conseillère municipale à Woippy du 30 septembre 1945 au 26 octobre 1947. Elle était estimée et connue de tous. De son mariage avec Edmond Crousse, elle eut trois enfants. Son mari n’est pas à ses côtés, employé aux ateliers du Chemin de fer de Montigny, il a été arrêté par les Allemands le 12 septembre 1942. Déporté dans différents camps, il ne devait plus en revenir. Il est décédé à Mauthausen le 24 décembre 1944.

Retournons dans l’allée centrale, cette petite visite s'achève et j'espère qu'elle vous a intéressé.
Non ! Non ! La visite n’est pas encore terminée ! On ne part pas ! On s’arrête. On se retourne. On ferme les yeux et on tend l’oreille. Vous patientez... Et là... le village de Woippy va se mettre à revivre : le Woippy d'autrefois, celui de 1870 et de l’annexion allemande avec la construction du fort Kameke tout proche, son retour à la France en 1918 avec les cloches de l'église qui ne s'arrêtent plus de sonner, son Entre-Deux-Guerres et sa période sombre et noire avec de nouveau la langue allemande, sa libération en 1945 et son après-guerre... et aussi, malheureusement, avec ses cortèges tristes, remplis de larmes et de pleurs, qui montent la côte pour accompagner l'enfant de Woippy à sa dernière demeure.
Et maintenant, si vous avez vraiment bien tendu l’oreille... depuis les tombes militaires de l’entrée, on perçoit le bruit de la charge des fantassins et des zouaves, les chevaux qui hennissent, on entend les soldats crier le traditionnel « À la charge! En avant! », parmi les bruits effroyables des canons et des chassepots, on voit les hommes trébucher et tomber sous les balles ou sous les boulets ennemis... on entend ensuite la retraite et le calme après la bataille où les ambulances partent à la recherche des blessés et des morts.
La guerre... cette horrible chose...
Le calme est revenu, et c'est alors que l'on entend distinctement de la musique, mais d'où vient-elle ? De partout ! Ce sont les musiciens de la Lyre, du Cercle Saint-Etienne et de l'Union qui défilent avec leurs instruments, et soudain, ils apparaissent, ils sont là, devant nous, tambour major en tête, les Lecomte, Marchal, Ladaique, Boda, Mangenot, Humbert, Bouvier, Lapied, Weber, Gusse, Michaux, Schmeiser, Perette, Zennezenne, Kratz, ... les Didier, Steffen, Paulin, Baugué, Kocher, Calmès, Guedra, Charette, Videmont, Remiatte, Glad, Boutter, Wilhelm ... les Bott, Billotte, Bayer, Sidot, Portenseigne, Mangenot-Neu, Hamès, Monfort, Grunwald, et les autres, et encore les autres... avec leur uniforme et leur casquette... puis les gymnastes avec les Copeaux, Lamort, Humbert, Kopp, Brice, Moitry, Kleman et bien d’autres... puis les pompiers, avec les Hennequin, Hubsch, Kreyenborg, Brusseaux, Feltz, et d’autres... puis l’Escadron Jeanne-La-Lorraine avec M. Sechehaye en tête des cavaliers...
Ils sont passés, le bruit s’éloigne, le silence revient... une voix s'élève... de là-bas, sur notre gauche, c'est le père Henry, « le Babiche » qui commence son discours, d'une voix grave et solennelle, appuyant sur certains mots pour mieux impressionner l'auditoire... puis des applaudissements qui s'élèvent, et enfin... c'est le pot... chez l'Albarède... « le Jeannot », comme on l'appelait, toujours prêt à pousser la chansonnette avec sa voix et son accent du midi... Lâcheur va ! il n'est plus avec tous ses copains, il a préféré aller dormir pour toujours dans son midi natal à Mazamet.
Mais ! Quelle est cette senteur qui nous chatouille les narines ? Ah oui ! C'est la saison des fraises, les champs entourant le cimetière dégagent leur arôme et nous embaument. Sur la route de Lorry, les charrettes remplies de beaux fruits rouges passent et repassent toute la journée sans interruption. Devant le fort, des militaires très friands de fraises achètent quelques paniers au passage... le soir est venu, malgré la fatigue, le village s'anime... le brouhaha ainsi que les airs à la mode nous parviennent. Nous nous apprêtons à rejoindre la fête quand tout à coup un grincement lourd et strident nous fait sursauter et nous ramène à la réalité : une personne voulant pénétrer dans le cimetière a ouvert la porte grinçante sur ses gongs et, surprise de notre béatitude, nous regarde émerger de notre spectacle.
Et, les yeux encore plein d'images, nous quittons ce lieu de souvenirs en nous promettant d'y revenir.
Philippe THOEN

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