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Avril 1963
Découverte d'un charnier à Metz-Nord
lors des travaux de l'autoroute
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En avril 1963, lors des travaux de l'autoroute, dans la zone de Metz-Nord,
un charnier datant de la dernière guerre est mis à jour

Ci-dessous, les articles de journaux s'y rapportant

Républicain Lorrain, Jeudi 4 avril 1963

UN CHARNIER datant vraisemblablement de la dernière guerre découvert à Metz.

Les ossements des charniers qu'on fait découvrir les travaux de l'autoroute à Metz-Nord, sont-ils ceux de malheureuses victimes du nazisme ?

Deux fosses communes, contenant des ossements humains, ont été découverts avant-hier à la suite des travaux entrepris à Metz-Nord pour la construction de l'autoroute. Le lieu s'en situe très exactement en bordure du canal entre le pont Eblé et les cités du chemin de la Moselle. Nous relatons en page régionale les circonstances de cette découverte et quelques-unes des hypothèses qu'elle peut suggérer. La plus vraisemblable demeure, celle de charniers datant de la dernière guerre et dans lesquels ont été jetés pêle-mêle les corps de victimes du nazisme, déportés ou prisonniers de guerre russes ou polonais, abattus sur place ou morts d'épuisement au cours d'un transfert NN. sortis des wagons de bestiaux d'un train s'étant arrêté en gare de Metz-Nord.
Avec les ossements retrouvés jusqu'ici, il peut être possible de reconstituer les squelettes partiels de trois ou quatre hommes. Mais d'autres apparaissent dans les parois de la tranchée ouverte par les scrapers pour permettre le passage de l'autoroute. Combien en est-il d'autres ? Les travaux d'exhumation ordonnés hier permettront de répondre à cette question, et peut-être de donner des indications plus précises sur la qualité et la nationalité de ceux qui ont vraisemblablement trouvé une mort atroce et dont le dernier repos a été troublé par des engins modernes de construction routière.
S'il s'agit bien réellement de victimes du nazisme, une enquête pourrait être ouverte pour tenter de retrouver ceux qui furent les auteurs du massacre, si massacre il y a eut. En effet, le délai de prescription pour les crimes de guerre a été étendu à trente ans, à compter de 1946, ce qui en reporte le délai à 1976.
Mais en attendant que d'éventuelles preuves puissent être apportées, le Parquet de Metz s'est rendu sur les lieux pour prendre les dispositions qui s'imposent. De toutes façons, les recherches seront poursuivies jusqu'à ce que soit acquise la certitude qu'il ne reste plus là aucun ossements. Il serait impensable, en effet, que l'autoroute passât au-dessus d'un charnier. Quoiqu'il en soit, les restes mortels de ceux qui ont été inhumés là aussi sommairement seront regroupés dans un ossuaire plus décent bien qu'anonyme.
Sur nos photos: en bas à gauche: une vue générale des lieux dont l'approche a été interdite toute la journée d'hier par des gardiens de la paix. En haut: le commissaire Berland du 1er arrondissement montre aux membres du Parquet, l'un des endroits où furent retrouvés des ossements. En bas, à droite : M. Kuhn, juge d'instruction et son greffier M. Hergat, examinent l'un des crânes qui ont été exhumés.

Deuxième article en pages régionales

MYSTERE autour d'un charnier de la dernière guerre découvert hier, dans un faubourg de Metz. S'agit-il de victimes du nazisme ou de militaires tués lors d'un bombardement et enterrés en hâte ?

Un « scraper », nivelant ce qui n'est encore qu'une simple piste, mais qui sera demain l'un des embranchements de l'autoroute Metz-Thionville, entre le pont Eblé et les cités du chemin de la Moselle, a mis à jour, mardi après-midi, des ossements humains dont le nombre, la disposition et l'aspect laissent supposer qu'il s'agit de victimes du nazisme. Un simple hasard a-t-il permis la découverte d'un de ces charniers dont les S.S. et la Gestapo ont été les sinistres pourvoyeurs durant la dernière guerre mondiale ? Seuls les travaux d'exhumation, qui seront entrepris dès aujourd'hui, permettront de le déterminer, mais dès à présent tout laisse à croire qu'en cet endroit reposent les restes torturés d'un nombre de martyrs encore impossible à préciser, mais qui pourrait se situer entre cinquante et cent cinquante.
A l'écart de la nationale 53, tout un vaste chantier est ouvert le long du canal des mines de fer entre la pont Eblé qui, au pied du building Sainte-Barbe, permet de franchir cette voie d'eau, et les nouvelles cités du chemin de la Moselle où résident de nombreuses familles ouvrières. Ces immenses travaux sont ceux de la portion de l'autoroute qui rejoindra celle déjà terminée, au-delà de la voie ferrée. Dans le remblai de celle-ci, de nouvelles arches sont en cours de construction, afin de permettre très bientôt cette jonction. d'énormes engins sont à l'œuvre qui tranchent et taillent dans les contrescarpes des anciennes fortifications, comblent les fossés et tassent la terre, là où doivent passer les voies de raccordement de l'autoroute avec le nœud routier déjà en service.
C'est à un endroit situé à quelques deux mètres en dessous du niveau primitif du sol que la lame du scraper a tranché ce qui semble bien être deux fosses communes, qui furent ouvertes parallèlement à cinq mètres de distance. Dès que les ouvriers aperçurent les premiers ossements, le chef de chantier fit cesser le travail et prévint le commissariat de police du 1er arrondissement messin. Accompagné de M. Berland, qui dirige ce dernier, le commissaire principal Martin, chef de la Sûreté, se rendit sur les lieux pour les premières constatations.

Prochaine exhumation
Le Parquet de Metz: M. Lelièvre, substitut du procureur de la République, M. Kuhn, juge d'instruction, et son greffier, M. Hergat, vint également sur place, hier en début d'après-midi, pour se rendre compte de l'importance de la découverte et étudier les mesures à prendre en vue d'une prochaine exhumation. M. Collot, conservateur des Musées de Metz, avait également été avisé et c'est en grande partie grâce à ses observations que put être acquise la quasi-certitude que les ossements ne peuvent être que ceux de victimes du nazisme.
De chaque côté de la large tranchée ouverte par les bulldozers affleurent les ossements et leur emplacement de part et d'autre de celle-ci permet de reconstituer le tracé approximatif des deux fosses dans lesquelles les corps furent jetés, les uns sur les autres semble-t-il. Dans l'une d'elles se distingue parfaitement la chaux vive, jetée sur les cadavres pour hâter l'anéantissement et en interdire l'identification. Dans l'autre, il apparaît nettement que la terre a été simplement poussée sur l'amas de corps. Ici et là apparaissent des côtes, un bassin, des fémurs à côté d'un crâne presque complet, d'une mâchoire fractionnée en deux parties portant chacune des dents en parfait état: celle d'un homme jeune et sain. Des tibias, quelques vertèbres encore soudées, d'autres ossements humains ont déjà été sortis du sol et déposés en tas, en attendant que soient déterminées les limites exactes des charniers et sortis les ossements qui y sont encore ensevelis.

Des hommes adultes
De l'étude à laquelle se livre avec minutie M. Collot, il résulte que les squelettes sont ceux d'hommes adultes, déposés là il y a relativement peu de temps, il ne peut en aucun cas s'agir d'une nécropole ignorée, remontant à d'autres âges. Pour l'instant, on n'a découvert ni urne funéraire, ni pierre tombale, ni objets familiers qu'immanquablement on eût retrouvés en l'occurrence. Incontestablement, les fosses ont été creusées bien antérieurement au XVIIe siècle, époque à laquelle Vauban conçut et édifia les fortifications de la cité messine; la macabre découverte a été faite, en effet, au milieu des fossés défendant les remparts, en un endroit où la terre a été apparemment rapportée. L'exhumation, au moment où entre les deux guerres fut creusé le canal, de squelettes de soldats enterrés non loin de là au cours du premier conflit mondial, pourrait laisser penser qu'il s'agit de corps inhumés à la même époque. L'absence de tout objet: boutons, boucles de ceinturon, clous de souliers, vient toutefois ici infirmer cette hypothèse.
Ne demeure que celle de déportés, de prisonniers de guerre ou de toutes autres victimes des nazis abattus ou morts d'épuisement et de privations, jetés nus dans une fosse, privés d'une sépulture décente.
La relative proximité du camp de Woippy qui vit avant 1944 passer de nombreux déportés, la voie ferrée située non loin de là, la solitude des lieux à l'époque, loin de toute habitation, autant de raisons qui permettent de penser que ces charniers datent de vingt ans à peine. Les constatations faites par le conservateur des musées messins viennent encore renforcer cette supposition: l'absence de tout objet métallique qui sous-entend la nudité des cadavres et aussi le fait que ceux-ci ont été recouverts de chaux vive, agissements coutumiers aux bourreaux hitlériens. D'autres part encore, les ossements n'ont pas encore pris cette teinte très brunâtre qui caractérise ceux depuis longtemps enterrés. Ils sont toujours pourvus du cartilage spongieux qui disparaît au bout d'un certain temps. Enfin, la terre qui les entoure n'a pas pris la couleur de l'humus des très anciennes sépultures.

Dans l'incertitude qui règne cependant en l'absence d'éléments tangibles quant à la qualité des morts anonymes qui reposent là, le Parquet a pris la décision de laisser à l'exhumation le caractère d'une formalité non pas judiciaire, mais administrative. Le nouveau directeur interdépartemental du ministère des Anciens combattants et victimes de la guerre, M. Berthier, a été avisé et a pris des dispositions pour le cas fort vraisemblable où l'affaire deviendrait de son ressort. Déjà hier, le commissaire Berland avait envisagé avec les ingénieurs des Ponts et Chaussées, chargés de la direction des chantiers de l'autoroute, de faire poursuivre les travaux d'exhumation par une équipe de terrassiers déjà sur place. Il s'agit d'ouvriers italiens qui se sont refusés à se livrer à cette tâche de « fossoyeurs », sans doute incompatible avec leurs convictions religieuses. D'autres dispositions ont été prises en conséquence pour que le travail puisse débuter aujourd'hui et qu'enfin ceux qui furent enterrés dans les fosses trouvent place dans un cimetière.

Des hypothèses
Certains ont avancé que l'on se trouve en présence de malades et de blessés décédés durant la guerre de 1914-18 alors qu'ils étaient en traitement à l'hôpital militaire installé dans les bâtiments en bordure du quai Richepanse, où se trouvent actuellement le Centre de formation des cadres de la sidérurgie. Ceux-là oublient que l'armée, qu'elle soit française ou allemande, a toujours eu le respect de ses morts. Aucun de ceux-ci, surtout à l'arrière -et Metz était loin du front- n'a connu la fosse commune sans qu'au moins une plaque ne permette de l'identifier. Les morts de l'hôpital allemand de Metz dorment tous leur dernier sommeil au cimetière Chambière. Par contre, ceux qui pensent que ce sont des prisonniers russes ou polonais, dont les cadavres ont été jetés en vrac dans les fosses, ont beaucoup plus de chance d'approcher de la vérité. Les fouilles qui vont être entreprises permettront de départager les avis.

Républicain Lorrain, Vendredi 5 avril 1963

Difficile enquête pour tenter d'établir l'origine des restes humains découverts dans le charnier de Metz-Nord

Ainsi que nous le relatons en rubrique régionale, l'enquête se poursuit activement, à Metz, pour tenter , sinon d'identifier, du moins d'établir exactement l'origine des restes humains découverts avant-hier dans un vaste charnier situé en bordure de l'autoroute Metz-Thionville.

Précisons de suite qu'il s'agit uniquement, pour le moment, d'une enquête administrative et qu'aucune information judiciaire n'a encore été ouverte. Il faudrait évidemment pour cela qu'ils soit certain que ces débris ont été inhumés à cet endroit à la suite d'un crime, fût-ce un crime de guerre, et voir si ce crime éventuel ne tombe pas sous le coup d'une prescription.
Pour le moment donc, le commissaire Berland, qui a été chargé de cette enquête administrative, se trouve devant une difficile énigme à résoudre. Il lui faut tout d'abord établir l'époque à laquelle les cadavres ont été enterrés, ensuite tenter de les identifier, au moins approximativement, et enfin rechercher dans quelles circonstances ils ont été amenés à cet endroit.
Pour le moment, et en toute objectivité, les services de police se refusent à confirmer s'il s'agit de militaires ou de prisonniers civils morts ou tués entre 1940 et 1944.

Expertise probable
Pour avoir une opinion définitive à ce sujet, ils attendent les résultats de l'expertise qui sera sans doute pratiquée, afin de fixer avec autant de précision que possible la date de l'inhumation. On sait, en effet, qu'après un certain nombre d'années, et notamment lorsqu'il ne subsiste plus aucun vêtement, mais rien que des ossements, il est assez difficile de « dater » un squelette et que des erreurs de plusieurs dizaines d'années peuvent aisément être commises.
Le premier travail qui est envisagé, et qui sera entrepris dès ce matin, sera donc d'exhumer la totalité des ossements découverts dans cette fosse commune. Cette opération sera confiée aux services municipaux du cimetière de Metz, qui procéderont avec soin et méthode et aussi avec tout le respect dû à des morts. Cette exhumation permettra sans doute aussi de faire des constatations plus précises que celles qui ressortent d'un examen superficiel après le passage du bulldozer qui mit à jour le charnier. On pourra sans doute déduire la position des corps, leur nombre, et peut-être aussi l'âge approximatif des victimes. Cela pourrait notamment ressortir de l'examen des mâchoires, des prothèses dentaires, et s'il était possible d'en trouver, d'une bague ou d'une alliance restée sur quelques cadavres.
Car, évidemment, les hypothèses ne manquent pas, et ont fait l'objet hier de maints commentaires, parmi les vieux Messins, et tous ceux qui connaissent l'histoire de leur ville et de ce quartier.

Des prisonniers russes ?
L'explication qui prévaut est, bien entendu, celle qui se rapporterait à l'inhumation sommaire de prisonniers de guerre russes, qui pourraient provenir d'un camp voisin. Les anciens prisonniers de guerre et déportés se souviennent en effet d'avoir vu pendant la dernière guerre des prisonniers enterrés dans certains camps par charrettes entières, dans des fosses communes. Par contre, en général, les soldats alliés ou allemands étaient inhumés avec un minimum d'égards : une croix de bois, une plaque d'identité, etc.
Toutefois, certains habitants de Metz se rappellent une épidémie de variole qui aurait sévi au début du siècle et qui aurait pu justifier l'ouverture d'une fosse commune. Il semble toutefois que cette explication ne soit pas conciliable avec le respect qui, à cette époque, était accordé en toutes circonstances aux défunts.
Quoi qu'il en soit, cette découverte aux portes même de la ville a causé hier une vive émotion dans la population messine qui n'a pu s'empêcher d'évoquer à cette occasion le souvenir des innombrables victimes de la dernière guerre.

Deuxième article en page régionale

La découverte d'un charnier dans les faubourgs de Metz.
L'expertise des ossements permettra sans doute de préciser la date d'inhumation des corps.

L'enquête se poursuit pour tenter d'identifier les ossements découverts, avant-hier, dans un charnier situé en bordure de l'autoroute Metz-Thionville.
Les hypothèses ne manquent pas, encore que l'explication la plus généralement retenue est celle de prisonniers de guerre russes. Durant la dernière guerre, beaucoup de Soviétiques ont été enterrés par charrettes entières, dans des fosses communes.
Certains avancent une épidémie de variole qui aurait fait de nombreuses victimes au début du siècle, mais il ne semble pas, à priori, que cette explication soit valable.
En fait, les enquêteurs attendent les résultats de l'expertise qui sera sans doute pratiquée, pour fixer avec un maximum de précision, la date de l'inhumation.
Quoi qu'il en soit, cette découverte a causé une vive émotion parmi ma population messine qui n'a pu s'empêcher d'évoquer le souvenir des innombrables victimes de la dernière guerre.

Républicain Lorrain, Samedi 6 avril 1963

Le charnier de Metz. 120 prisonniers russes exécutés en 1944.
Selon le témoignage d'un ancien déporté, le charnier découvert à Metz contiendrait les restes de 120 prisonniers russes.
Des boutons d'uniformes de l'armée soviétique découverts sur les lieux confirment cette thèse.

Ce sont bien des corps de prisonniers russes exécutés sommairement à la fin de la dernière guerre qui ont été jetés dans le vaste charnier mis à jour mardi, lors de l'exécution de travaux de terrassement de l'autoroute Metz-Thionville.
Hier matin, en effet, un ancien déporté du camp de Woippy, âgé de 62 ans, se rendait sur les lieux et déclarait au commissaire qu'il se souvenait fort bien des faits suivants: Le 28 septembre 1944, les troupes américaines se trouvaient à quelques kilomètres de Metz, où l'on entendait les fusillades des combats en cours aux environs de Gravelotte. Le soir de ce jour, les gardiens allemands d'un « kommando » de travail situé non loin du carrefour actuel de la route de Thionville, rassemblèrent rapidement environ 120 prisonniers de guerre russes pour, dirent-ils, les transporter dans un camp en Allemagne. Les malheureux furent emmenés hors du camp, mais il ne fait aucun doute qu'ils ne furent pas embarqués en direction de l'Allemagne. A ce moment, en effet, les voies de chemin de fer étaient coupées, les gares étaient constamment bombardées par l'aviation et l'artillerie alliée, et les transports par route étaient exclusivement réservées aux convois militaires prioritaires. Le lendemain de ce départ, les déportés du camp de Woippy acquirent la conviction que les prisonniers russes avaient été exécutés. En fait, ils ne reparurent jamais au camp et plus personne ne les revit.
Il est donc très probable que les restes humains trouvés en bordure du canal sont ceux des malheureuses victimes d'une exécution sommaire qui succéda à ce rassemblement.
Cette déclaration jetait un jour nouveau sur la macabre découverte, et quelques éléments supplémentaires devaient, dans la journée d'hier, confirmer cette hypothèse.
En effet, dès le matin, une équipe d'ouvriers, sous la direction active de M. Urbain, employé municipal du cimetière de l'Est, procédait au déblaiement soigneux de la terre recouvrant les ossements. Ceux-ci étaient sortis un par un, dégagés de la gangue de terre qui les recouvrait, et placés dans des caisses mortuaires transportées à la morgue du cimetière de l'Est par les soins des Pompes funèbres.

Des boutons d'uniformes russes
Ce travail d'exhumation a permis d'établir que presque tous les cadavres étaient ceux d'hommes jeunes, dont la dentition en particulier était en excellent état, sans plombages ni prothèses, et de constitution vigoureuse, caractérisée par la longueur et la solidité des ossements. En outre, on découvrit quelques boutons de chemises, de fabrication grossière (en os et en bois) ainsi que des boutons d'uniformes russes avec quelques débris de tissu de teinte brunâtre.
A la fin de la matinée, une quarantainpe de squelettes avaient déjà été dégagés. Ce nombre était malheureusement approximatif, les os étant en trop mauvais état pour qu'il soit possible de dénombrer les membres, ou même les crânes, dont la majorité ne pouvaient être extraits de terre que par morceaux. Il fut ainsi établi que les corps avaient été jetés les uns par dessus les autres, ce qui fait que les ossements de plusieurs cadavres, tassés par la terre depuis vingt ans, se trouvaient mélangés de façon inextricable.

Bilan impressionnant
Les travaux se poursuivirent durant toute la journée et, à la tombée de la nuit, on évaluait à environ 80 le nombre de cadavres découverts.
Hélas! ce chiffre est loin d'être définitif, puisqu'il en reste encore une quantité qu'il n'est pas possible d'estimer avec précision.
Hier encore, les autorités municipales, représentées par MM. Houppert, adjoint au maire; Didelot, chef de service de l'état civil, et son adjoint M. Halter, ainsi que M. Callot, secrétaire général de mairie, se sont rendus sur place et ont décidé de prendre à la charge de la municipalité les frais d'exhumation et de transfert des restes des malheureuses victimes.
Hier soir, une quinzaine de caisse avaient déjà été nécessaires pour transporter les ossements à la morgue du cimetière de l'Est de Metz.
Aucune disposition n'a encore été prise pour l'inhumation définitive des dépouilles mortelles de ces martyrs de la déportation. Il est à prévoir que l'ambassade de l'Union Soviétique sera informée de cette découverte par une voie officielle. D'autre part, les associations d'anciens combattants, de victimes de guerre et de déportés voudront sans doute donner une certaine ampleur aux obsèques, qui pourraient, dans ces conditions, prendre un caractère officiel, avec sans doute la participation d'anciens déportés et peut-être d'une délégation soviétique.
Certains anciens déportés du camp de Woippy ont même proposé que, lorsque l'autoroute sera terminée, une stèle commémorative soit érigée à l'emplacement du charnier, pour rappeler aux automobilistes de passage le caractère tragique de ces lieux et les souvenirs qui s'y rattachent.
Précisons encore que, toujours selon le témoin qui s'est fait connaître hier matin, le camp où étaient internés ces prisonniers russes était commandé par un certain commandant Gridlig, qui fut après la guerre, condamné à mort et exécuté comme criminel de guerre.

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